Installation d’une balise GPS sur cette femelle de sarcelle d’hiver ; centre de baguage de Sao Jacinto (crédit photo P. FRANCOIS)
Depuis maintenant deux ans, l’ANCGE s’est associée à l’Université de Coimbra et au Professeur David Rodrigues dans le cadre du programme d’étude de l’hivernage et de la migration de la sarcelle d’hiver au Portugal.
C’est dans ce contexte qu’une délégation de notre Association Nationale s’est rendue sur place afin de participer aux activités de baguages d’anatidés et d’équiper 5 sarcelles d’hiver avec des balises GPS. Cette technologie de pointe permet de suivre les oiseaux sur leur migration prénuptiale puis postnuptiale. L’objectif est d’évaluer leurs déplacements spatiaux en Europe au sein de leur couloir de migration et d’analyser les dates de ces déplacements.
Entre le 20 et le 23 février 2017, ce sont donc 4 membres de l’ANCGE qui ont effectué le déplacement : Didier VERGY, Président, Jean-Louis DUREL, Trésorier, Loic PODVIN, Responsable du projet et Pierrick FRANCOIS, Conseiller scientifique et technique.
Retour en photo sur ces quelques jours de visites de Marais, d’échanges et de travaux ornithologiques.
20 février - Départ pour SAO
Tout juste débarqué à l’aéroport de Porto, nous prenons la route de la Réserve Naturel des Dunes de Sao Jacinto. Cette réserve a été créée en 1979 et s’étend sur 960 hectares de dunes, de tourbières et de marais forestiers fermés. Elle se trouve sur la côte Atlantique, au centre du Portugal, à proximité d’Aveiro. L’accès à cette réserve est limité aux ornithologues et aux scientifiques qui y travaillent. Elle offre de nombreux étangs reliés entre eux par des fossés et des chenaux de tailles moyennes dans lesquels se développe une végétation denses, offrant ainsi de multiples caches aux canards présents.
Après deux heures de routes, nous retrouvons David Rodrigues et son équipe sur place. Nous nous rendons au centre de la Réserve pour baguer les Sarcelles d’hiver, piégées à la nasse le matin même. Parmi ces canards, 2 vont être équipées du système de localisation.
Par ailleurs, nous avons pu procéder à de nombreuses observations d’oiseaux bagués les années précédentes. Au total, plus de 100 oiseaux bagués ont été comptabilisés et plus de 1 000 canards ont été observés. Parmi lesquels une grande majorité de sarcelles d’hiver et de canards siffleurs. A noter la présence d’une femelle de Fuligule milouinan équipée d’une bague nasale et d’un mâle Siffleur d’Amérique qui s’est égaré au Portugal suite aux tempêtes successives du début du mois de février.
Détermination de l’âge de la sarcelle par lecture d’ailes, après pose d’une bague nasale (crédit photo P. FRANCOIS)
Installation de bague par Loïc PODVIN ; centre de baguage de Sao Jacinto (crédit photo P. FRANCOIS)
Installation d’une balise GPS sur cette femelle de sarcelle d’hiver ; centre de baguage de Sao Jacinto (crédit photo P. FRANCOIS)
En cas de prélèvement ou si l’oiseau est retrouvé mort, il est important de contacter l’ANCGE (crédit photo P. FRANCOIS)
Diversité de canard – étang de Sao Jacinto (crédit photo Pierrick FRANCOIS)
21 février - Visite de la Réserve de TAIPAL
Ce marais, ainsi que ceux d'Arzila et Madriz, représente un des derniers exemples de ce type de zone humide dans la région centrale. Taipal s’étend sur 233 hectares, avec une altitude maximale de 25 mètres. Il s’agit d’un marais enclavé, colonisé par plusieurs hectares de roseaux. Dans ces marais, on retrouve, outre la Sarcelle d’hiver, de nombreux canards Pilets et Souchets. Quelques Chipeaux et plongeurs sont également présent.
Ce marais, site Ramsar, représente une magnifique zone d’hivernage pour les anatidés. C’est également une zone de nidification pour de nombreux colvert et pour plusieurs autres espèces d’oiseaux d’eau.
Diversité de canards à Taipal (crédit photo P. FRANCOIS)
Présence de nombreuses colonies de flamants roses – Marais situé en bord de mer (crédit photo P. FRANCOIS)
Le marais de Taipal est classé en réserve de chasse. Néanmoins, de nombreux marais limitrophe sont autorisés à la chasse. Au Portugal, les chasseurs n’utilisent pas d’appelants comme en France. Il chasse uniquement à la volée ou à la botte, avec un chien. La chasse de nuit est interdite et n’a jamais été traditionnellement implantée au Portugal.
Contrairement à la France, toutes les espèces de canards chassables au Portugal sont soumises à un plan de gestion. A l’échelle de tout le pays, les oiseaux de chaque espèce peuvent être prélevés en plus ou moins grande quantité suivant les densités et le succès reproducteur. Ces « quotas » varient d’une année sur l’autre. Pour chaque chasseur, il existe une limite de prélèvement de 8 toutes espèces confondues.
Ce mode de chasse raisonné est mis en place par les chasseurs locaux qui sont responsables de leur activité. Ils travaillent de concert avec les organismes de protection de la nature, qui, contrairement à la France, n’ont pas une vision dogmatique anti-cynégétique.
Au Portugal, l’espèce phare est le canard colvert. Bien que plusieurs espèces de sauvagines soient chassables, le chasseur préférera dans la plupart des cas tirer un colvert à une autre espèce. L’autre espèce particulièrement appréciée par les chasseurs locaux est la bécassine des marais, qu’ils chassent au chien d’arrêt dans les roselières ou dans les prairies humides.
22 février - Visite de la Réserve naturel de l'Estuaire du Tage
Le 22 février 2017, nous empruntons une route de 14 kilomètres qui nous fait rentrer au cœur des marais du Sud du Portugal. Situé à proximité de Lisbonne, la Réserve naturelle de l’estuaire du Tage offre un cadre qui rappelle les grands marais de l’Ouest de la France. Plusieurs centaines de kilomètres carrés de marais salés, saumâtres et doux accueillent une avifaune riche et diversifiée.
Au bord de l’estuaire, situé à 14 km de la première habitation, se trouve le centre d’observation et de baguage d’EVOA. EVOA est situé dans la réserve naturelle de l'estuaire du Tage, une des plus importantes zones humides au Portugal. Les visiteurs peuvent profiter de la présence de plus de 100 espèces d'oiseaux dans la nature, dans plus de 70 ha de zones humides.
Accompagné de l’équipe de bagueurs locaux, nous avons pu accéder à la lagune principale de la Réserve qui accueille plusieurs milliers de canards chaque hiver. C’est le long de cette lagune que l’équipe du Professeur Rodrigues a installé le canon, qui permet de capturer puis baguer de nombreuses sarcelles, lorsque ce dernier est actionné à bon escient.
Nous avons eu la possibilité de nous placer dans l’observatoire le plus proche de la lagune. Entre 10 000 et 12 000 sarcelles d’hiver était là, barbotant dans la lagune. Un spectacle magnifique, devenu encore plus exceptionnel suite aux attaques répétées d’un Aigle botté, essayant de prédater les sarcelles, provoquant ainsi l’envol et le tourbillon des canards. Nous n’avons pas observé l’aigle attraper un oiseau, mais le bal des sarcelles a perduré pendant de longues minutes dans une ambiance sonore inégalée.
Ce jour, les conditions n’étaient malheureusement pas réunies pour l’utilisation du canon filet. Nous n’avons donc pas pu procéder à la capture de canard. En revanche, le canon filet a été actionné quelques jours après notre départ, ce qui a notamment permis au Professeur Rodrigues d’installer 3 nouvelles balises GPS sur 3 nouvelles sarcelles.
Pierrick FRANCOIS - Conseiller scientifique et technique